Un ballon monté affranchi au dos
Lors de la guerre contre la Prusse en 1870, Paris s'est retrouvé
encerclé. De nombreux moyens ont été essayés pour faire franchir
ce blocus au courrier, dans les sens Province-Paris ou Paris-Province.
Parmi ceux mis en place, les ballons montés ont été la
manière la plus efficace dans le sens Paris-Province. De tels
documents sont les premiers à avoir voyagé par les airs, ce
sont des précurseurs recherchés dans le monde entier de la
Poste Aérienne.
C'est quoi exactement un ballon monté ? C'est un ballon
(pas très différent d'une montgolfière) monté (donc ayant
un aérostier et éventuellement des passagers), par extension
c'est un pli ayant voyagé par ce moyen. On parle de ballon
libre quand personne n'était à bord. À noter que
les pigeons faisaient souvent partie du voyage, les pigeons
étant le moyen le plus efficace pour faire rentrer le
courrier (sous forme de microfilm) dans Paris.
On les reconnaît grâce à un cachet de départ (de Paris ou de
la banlieue proche) et un cachet d'arrivée (en province, parfois
à l'étranger car les ballons étaient tributaires de la météo
et atterrisaient là où les vents les portaient). Tout cela
en tenant compte des dates que l'on connaît précisément
(en tout cas pour les départs, dont la presse parisienne
rendait compte). Parfois, ce n'était pas obligatoire, une
mention manuscrite "par ballon monté" était portée par
l'expéditeur sur le pli ou présente imprimée sur une formule
spécifique ; c'est une indication mais il
existe des plis ainsi marqués qui n'ont pas pris leur
envol (expédiés hors de Paris à la fin du siège par exemple).
Le pli reproduit est du ballon monté "La poste de Paris",
qui contenait les plis postés du 15 au 17 janvier 1871.
Le timbre à date de Paris-Les Ternes est à la date du 16 janvier
(3ème levée). Il est présenté déplié : à l'époque, l'enveloppe
était peu utilisée, la ou les feuilles étaient pliés pour former
l'envoi, une des feuilles restant vierge au dos pour permettre
l'ajout de l'adresse et de l'affranchissement.
Ce ballon a pour particularité d'être oblitéré du gros chiffre
(les étoiles spécifiques aux bureaux parisiens sont plus courantes)
d'un bureau de la banlieue intra-muros, c'est un critère de
plus-value selon les catalogues.
Davantage encore, le losange gros chiffre est porté non
seulement sur le 20c Siège placé au verso à des fins d'annulation,
mais aussi au recto sans finalité d'annulation.
L'utilisation du gros chiffre en marque postale non oblitérante est
exceptionelle, ce cachet était justement prévu comme oblitération.
L'explication vient de l'affranchissement au verso
(c'est un petit pli et il n'y avait guère de place au recto) :
cette empreinte a pour objet de signaler que l'affranchissement
est correct grâce au(x) timbre(s) au dos.
C'est la seule utilisation prévue de ce cachet purement oblitérant
en dehors du timbre.
L'instruction générale des postes, édition de 1856 (source Le Monde
des Philatélistes de juillet-août 1993) dit dans son article n°409 :
Timbres-postes appliqués par erreur au dos d'une lettre.
Lorsque par erreur, un ou plusieurs timbres-postes, d'une valeur
suffisante, ont été appliqués au dos, au lieu d'avoir été apposés
sur la suscription d'une lettre, cette suscription est frappé
d'un timbre oblitérant, indépendamment de celui que doivent
recevoir les timbres postes (...)
À l'époque, l'administration écrivait "timbres-postes" ainsi
au pluriel au lieu de "timbres-poste".
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